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Céline Laurichesse - Assemble - éditions ContentA

Céline Laurichesse, l’entrepreneuse de l’intérêt général

 

De Solidarité Sida à Assemble, des études de droit à l’entrepreneuriat, en passant par la création de la fondation Bouygues Telecom, le parcours de Céline Laurichesse est dirigé par  l’envie d’être utile. Avec sa société Assemble, elle réunit les entreprises qui ont des projets de mécénat et les associations qui ont des besoins financiers, de savoir-faire voire de produits. Rencontre avec une entrepreneuse de l’intérêt général.  


Comment écris-tu « entrepreneur » au féminin ?

Entrepreneuse.


Comment es-tu devenue bénévole ?

J’ai suivi des études de droit pour être utile aux gens. Après une maîtrise, je me suis retrouvée dans un DESS (devenu Master 2) de droit européen à étudier des arrêts de la Cour européenne. Comme je m’ennuyais, il fallait que j’utilise mon temps disponible pour être utile.

Le déclic a eu lieu pendant la Nuit du Zapping, organisée par l’association Solidarité Sida. Quand j’ai vu toutes ces personnes qui se mobilisaient pour une cause, je voulais absolument en faire partie.

Je suis devenue bénévole pour me rendre utile.

Mon implication au sein de Solidarité Sida était telle que j’ai abandonné mon DESS de droit européen. Par la suite, l’association m’a proposé un poste de chargée de communication et m’a aidé à reprendre un DESS de communication politique et sociale à l’Université de la Sorbonne. C’était très intense mais passionnant : la journée, je travaillais à l’association et le soir, j’étudiais, 7 jours par semaine !

Tous les jours, j’étais en contact avec des entreprises pour trouver des partenariats et de l’aide pour organiser tous les événements de l’association, comme le plus connu, le festival Solidays. J’ai découvert que l’entreprise n’avait pas seulement un rôle de création de valeur, elle pouvait aussi avoir un impact positif pour la société toute entière.


Comment as-tu créé la Fondation Bouygues Telecom ?

Après 7 ans à Solidarité Sida, j’ai décidé d’aller dans une entreprise mécène pour être du côté de ceux qui ont les moyens. J’ai écrit à 7 présidents de société dont l’engagement social m’intéressait pour être l’artisan du mécénat dans leur entreprise. C’est Bouygues Telecom qui m’a offert la première opportunité de devenir responsable du mécénat.

J’ai créé la fondation Bouygues Telecom et je l’ai dirigée pendant 10 ans.

L’activité d’une fondation d’entreprise ne s’arrêtait pas à faire un chèque. Il s’agissait de co-construire les projets que nous soutenions avec tous les acteurs. Nous avions choisi trois domaines privilégiés : l’environnement, la solidarité et la promotion de la langue française. Par exemple, la fondation Bouygues Telecom organisait avec des grands éditeurs et un partenaire média, le prix Nouveau Talent pour permettre à des jeunes auteurs de publier leur premier roman.

En fait, j’étais une intrapreneuse à l’intérieur du groupe Bouygues Telecom.

Mon rôle était aussi d’embarquer les 7 000 salariés du groupe dans cette aventure. J’étais très écoutée et très soutenue. Les valeurs de Bouygues Telecom ne sont pas que des mots sur une plaquette. Sa fondation est très respectée.


Comment es-tu devenue entrepreneuse ?

Rien dans mon entourage, ni familial ni amical, ne me prédisposait à me lancer dans l’entrepreneuriat.

À l’approche de mes 40 ans, la volonté d’être entrepreneuse commençait à prendre forme. Ma première idée était de créer une société avec Dorothée Corbier, ma binôme à la fondation Bouygues Telecom. J’avais très peur de me lancer mais Dorothée m’a dit un jour : « Tu es déjà entrepreneuse ! ».

Alors quand Bouygues Telecom a lancé un plan de départs volontaires, j’ai saisi l’opportunité. Avec 10 ans d’ancienneté, j’ai profité de conditions financières avantageuses et d’un suivi personnalisé pour créer ma société : une formation en anglais et un accompagnement par des consultants spécialisés en création d’entreprise pendant un an.

Malheureusement, Dorothée n’a pas été sélectionnée dans ce plan de départs volontaires. J’ai quand même créé la société Assemble fin 2015, toute seule. J’ai réussi à la développer et Dorothée a pu me rejoindre comme directrice associée fin 2018.


Quelle est la mission d’Assemble ?

Notre métier est de faire en sorte que les entreprises et les organismes sans but lucratif puissent ensemble créer de la valeur pour l’intérêt général.

Les associations ont besoin d’argent pour répondre aux problématiques d’intérêt général mais pas seulement. Elles ont aussi besoin de compétences ou de produits.

Par exemple, une association de lutte contre le cancer regroupe des experts sur le sujet mais elle a des besoins en compétences dans d’autres domaines comme les ressources humaines, la finance, etc.

Assemble a pour mission d’assembler ces personnes, de mettre en relation les associations qui ont des besoins financiers, de savoir-faire et de produits et les entreprises qui peuvent répondre à ces besoins, avec une compréhension précise des enjeux des deux côtés.

Du côté des entreprises, nous développons le mécénat stratégique, c’est-à-dire le mécénat qui entre dans la stratégie de l’entreprise en parfaite adéquation avec son histoire, ses valeurs, ses activités pour acquérir une légitimité à soutenir ces projets. Par exemple, la fondation Orange a choisi lors de sa création de soutenir des projets de communication empêchée par des handicaps. C’est en cohérence avec son cœur de métier qu’est la communication.

Le mécénat stratégique n’est ni ornemental, ni de l’optimisation fiscale, encore moins ce qu’on appelait avant « la danseuse du président » pour désigner la lubie du président de la société qui soutenait la danse classique par goût pour la danseuse !

Les entreprises mécènes doivent agir d’abord pour l’utilité et ensuite chercher des externalités positives comme la fidélisation des collaborateurs et des clients, pas l’inverse. Une organisation qui ne cherche que les effets positifs d’une opération de mécénat n’obtiennent jamais les résultats attendus.


Qu’est-ce qu’un entrepreneur ou une entrepreneuse pour toi ?

Un entrepreneur ou une entrepreneuse est une personne qui a un projet, qui entrevoit les résultats de ce projet et qui est capable de mettre en place la méthodologie, les outils et surtout l’énergie pour que ces résultats soient atteints.

L’énergie est essentielle à l’entrepreneuriat.

Un entrepreneur déploie une vision plus grande que lui. Il détermine ce à quoi il aspire, ce vers quoi il va et comment ce sera après son passage. De cette vision découle ensuite la stratégie mise en place.


Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui veut se lancer dans l’entrepreneuriat ?

La réussite dépend beaucoup de notre entourage. Je ne me serais pas lancée si je n’étais pas entourée comme je le suis parce que l’entrepreneuriat a un impact sur tout l’entourage, surtout la famille. Le soutien de mon mari est indispensable. Un projet ne peut pas fonctionner si l’entourage proche n’y croit pas. Donc mon premier conseil à cette personne serait de poser le projet et la vision avec les gens qui l’entourent.

Un exemple concret : je pars beaucoup plus en vacances avec mes enfants depuis que je suis entrepreneuse, mais j’emporte toujours mon ordinateur que je regarde tous les jours. Si je ne le regarde pas, je ne dors pas. Tout se passe bien parce que mon entourage est d’accord avec ce mode de vie. L’entrepreneuriat a des incidences sur la vie quotidienne.

Mon deuxième conseil serait de se méfier du côté « Je n’ai plus de patron » de l’entrepreneuriat. Quand tu deviens entrepreneur, le patron, c’est toi-même ! Et si tu n’as plus de patron à proprement parler, tu as quand même des clients à qui il faut rendre des comptes.


Quel livre t’a particulièrement marquée ?

Je suis une grande lectrice de romans. Le roman qui m’a le plus touchée est « La plus que vive » de Christian Bobin. L’auteur raconte la déflagration provoquée par le décès de sa meilleure amie mais c’est un livre lumineux. Je me souviendrai toujours de la première phrase : « L’événement de ta mort a tout pulvérisé en moi. Tout sauf le cœur. » J’aime beaucoup sa façon d’écrire sur les petites choses de la vie. C’est la somme des petites choses qui fait la vie.

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